Le blues des algorithmes
Alors qu'elles n'ont jamais été autant utilisées, les plateformes sont accusées de tous les maux. On fait le point. Newsletter #126
Nous sommes une agence de conseil en innovation. Explorez nos missions et références ici : 15marches.
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💌 Vous et moi
Partager des bonnes nouvelles est de plus en plus rare par le temps qui court vous ne trouvez pas ? Permettez-moi une fois n’est pas coutume de vous transmettre quelques informations sur la vie de l’agence avant de démarrer. Vous pouvez aussi zapper directement au chapitre suivant.
Le 17 novembre j’aurai le plaisir de donner une conférence à Connect’in Lorient également diffusée en live stream. Le sujet me tient particulièrement à coeur puisqu’il s’agira d’analyser les effets de la crise du COVID-19 sur les secteurs de la mobilité, du commerce et du travail. Un bel exercice pour distinguer les effets purement conjoncturels de ceux plus profonds qui affectent ces secteurs. Les lecteurs fidèles de cette lettre ne seront pas dépaysés. S’inscrire ici
Nous venons également de remporter une mission de conseil pour l’Agence de Mobilité Durable de Montréal. Nous allons aider l’Agence à analyser le marché des solutions numériques de stationnement pour définir sa propre stratégie technologique. Cerise sur le gâteau, cette mission sera réalisée avec nos complices de la Fabrique des Mobilités Québec et le cabinet ibicity.
L’année 2020 aura été globalement positive pour l’activité de 15marches malgré des changements profonds dans nos pratiques (nous sommes passés de 90 journées/an en déplacement à quasiment 0). Pas de baguette magique mais sans doute quelques retours à partager sur la manière de tirer parti des évènements. Faites moi signe si vous êtes intéressé·e.
(Fin de la parenthèse interne)
🎯 Cette semaine
Les algorithmes ont le blues. Alors que les plateformes n’ont jamais été aussi utilisées - confinement aidant - elles n’ont jamais été aussi décriées.
Avec l’approche des élections américaines, le sujet de la responsabilité des réseaux sociaux dans la diffusion de fausses nouvelles revient en tête des préoccupations. Facebook a pris les devants en limitant drastiquement les publicités à caractère politique et en incitant ouvertement à aller voter.
Mais un récent conflit avec des chercheurs d’une université américaine illustre bien le dilemme de la plateforme de Mark Zuckerberg : lorsqu’elle s’ouvre à des tiers, elle est accusée de disperser les données de ses utilisateurs (cf. Cambridge Analytica), et quand elle referme ses outils, elle est accusée de dissimuler le fonctionnement de ses algorithmes. Bras de fer entre Facebook et NYU sur un projet de recherche sur le ciblage publicitaire politique
Plus grave, il semble que les questions de fond soulevées lors des élections de 2016 soient toujours sans réponse. Une plateforme est-elle un simple service de communication qui ne doit pas se préoccuper des contenus échangés (comme un réseau téléphonique), ou est-elle un véritable média responsable des contenus diffusés ? Nous avions écrit il y a deux ans sur ce sujet : Facebook : comment arrêter la machine infernale ?
Ben Thompson rappelle avec justesse que, si les plateformes comme Facebook et Twitter contribuent à la propagation des fausses nouvelles, ce sont bien certains grands médias traditionnels qui ont donné crédit en premier lieu à ces fausses nouvelles : Twitter, Responsibility, and Accountability
Photo : Michael Dziedzic on Unsplash
Facebook et Twitter ne sont pas les seuls sur la sellette.
Les apps de transport et de livraison sont accusées elles de ne pas être de simples intermédiaires qui rapprochent offre et demande, mais de véritables employeurs. Le “management par les algorithmes” les ferait entrer dans le droit du travail et non celui du commerce…
Mais comme dans Terminator où le méchant criblé de balles se relève encore et encore, les plateformes Uber, Lyft ou Deliveroo sont toujours là malgré les annonces répétées de leur mort imminente.
Derniers épisodes en date :
À Londres, Uber est finalement autorisé à continuer ses opérations sur l’un de ses plus gros marchés européens. Uber Can Continue Operating in London, Judge Rules
En Californie à l’inverse, un énième jugement condamne Lyft et Uber à requalifier leurs chauffeurs en salariés. California appeals court rules Uber, Lyft must reclassify drivers as employees. En attendant un vote la semaine prochaine qui devrait statuer définitivement sur le sujet.
La France elle donne l’impression d’un match de ping-pong entre juridictions qui peinent elles aussi à traduire dans les faits des injonctions souvent contradictoires…
Chauffeurs d’Uber et taxis s’attaquent au groupe américain
Et enfin, pour illustrer à quel point c’est bien le modèle même de plateforme qui est au coeur du débat, une nouvelle affaire qui concerne…Zoom, le service de réunions et conférences en ligne. Zoom est accusé d’avoir supprimé plusieurs évènements programmés au prétexte qu’ils ne respectaient pas ses règles de fonctionnement. Or, certains de ces évènements portaient sur…la (prétendue) censure de Zoom, soulevant des accusations d’impartialité. À suivre. Zoom Deleted Events Discussing Zoom “Censorship”
🧐 Et aussi
Intéressons-nous maintenant aux effets de l’hégémonie des plateformes.
Avec la crise sanitaire, de profonds changements ont lieu dans la manière de consommer, mais aussi de vendre, en ligne. Le commerce est en train de vivre une révolution silencieuse. Les changements constatés depuis quelques mois correspondent à 5 à 10 ans d’évolution “naturelle”. Difficile par conséquent d’en tirer des conclusions à long terme. Il y a ce que l’on sait - de plus en plus de gens achètent en ligne, des produits de plus en plus variés - et ce qu’on ne sait pas - cela durera-t-il après la crise ? Quel est l’impact du télétravail sur les habitudes de consommation ? Les grands centres commerciaux de périphérie vont-ils disparaître ? Qu’adviendra-t-il des grandes marques qui vivaient essentiellement à travers la grande distribution ? Quelles sommes vont basculer de la location de fonds de commerce vers la publicité en ligne ? Et enfin, vous vous en doutiez, comment échapper à l’emprise des plateformes ? L’analyste Ben Evans nous livre une analyse inspirante. Resetting online commerce
🤩 On a aimé
Une mine de ressources et d’actualités sur les évènements virtuels, mais aussi un très bel exemple de blog d’entreprise : Event Manager. Si vous réfléchissez à une politique de contenus pour votre activité, inspirez-vous en (ou appelez-moi 🤗).
L’agence Event Manager est désormais rattachée à Skift, qui est pour moi l’un des meilleurs médias “de niche” sur le web. Parce qu’il traite du voyage et du transport aérien, mais aussi parce qu’il est en train de se réinventer totalement avec la pandémie, revoyant à la fois ses contenus à son modèle économique.
‘Wearing our pain on our sleeve’: Inside Skift’s survival strategy
Plus près de nous, l’ancêtre du covoiturage trouve ses racines dans une autre crise : le choc pétrolier de 1973. Cette exceptionnelle archive de l’INA semble étonnamment d’actualité (sauf les coupes de cheveux évidemment). On n’en changerait quasiment pas un mot aujourd’hui 1974. On a retrouvé le "car pool", l'ancêtre du covoiturage
Pour finir, une application qui vise à meubler les silences dans une réunion en ligne (vous savez, quand tout le monde attend que le boss se libère d’un autre call), en diffusant… de la musique d’ascenseur. Je vais l’installer dès cette semaine. Uhmmm
Avant de partir, n'hésitez pas à partager cette lettre si vous l'appréciez, ou laissez un petit 💙 pour la route. Merci !
À la semaine prochaine.
Stéphane
Lectrice depuis 1 an, je prends enfin le temps de vous dire combien j'adore vous lire toutes les semaines et l'éditorialisation de votre newsletter est vraiment une des meilleures que je puisse lire actuellement en français. Un merci particulier pour cet article sur la survie de Skift dans Digiday. Pour avoir travaillé avec eux par le passé, je retrouve une équipe résiliente qui j'espère survivra longtemps.
J'apprécie beaucoup cet article. Je ne vois pas comment les réseaux sociaux tels que Facebook pourraient échapper à la classification de média. Les algorithmes orientent au départ les informations sur la base d'un de nos choix de recherche, mais très vite le "reste (c-à-d pas l'info que nous choisissons" prend le relai et ce reste est entièrement entre les mains de ces géants de la data. Ajoutons y les GoogleAds et autres pub payantes...je suis à peu près certaine que 95% de l'info qui nous est présentée n'est pas randomisée. D'où l'intérêt de continuer à s'informer ailleurs (presse audio, presse écrite etc...), notamment chez les jeunes.