Votre produit est-il un "must have" ou un "nice to have" ?
Derrière ce jargon de startupers se cache une question fondamentale pour les créateurs. On vous aide à y répondre #214
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💌 Vous et moi
Pourquoi certains produits nouveaux réussissent, et l’immense majorité des autres échouent ? Comment tel produit ou tel service passe-t-il d’un usage par quelques passionnés à un usage plus “démocratisé” ? Pourquoi certains deviennent indispensables alors que d’autres finissent dans un tiroir ?
Demandons-nous cette semaine avec les anglo-saxons : votre produit est-il un must have (indispensable) ou un nice to have (sympa mais on peut s’en passer) ?
🎯 Cette semaine
Chaque semaine un nouveau sujet décrypté. Cette semaine : les concepts de must have et de nice to have.
Est-ce que votre produit est critique pour ses (futurs) utilisateurs ou simplement quelque chose qu’ils vont apprécier puis délaisser ? Comment réduire ainsi le risque de perdre son temps et son argent en développant ou investissant dans un produit qui ne serait qu’un nice to have ?
Pour des investisseurs, cette différence est essentielle. Elle sépare les produits "sympas" des produits qui changent le marché. Pour les concepteurs et entrepreneurs, cette question impose de bien analyser son marché pour comprendre pour quels utilisateurs leur produit pourrait être un must have.
Sur une île déserte
La première définition est un lapalissade : un produit must have est l’un de ceux que dont vous ne pourrez plus vous passer. Un produit que vous emporteriez sur une île déserte. À l’inverse un produit nice to have est un produit que vous pourrez abandonner sans état d’âme. Un coup d’oeil dans le fond de vos tiroirs devrait vous renseigner rapidement sur les produits nice to have que vous possédez.
Au premier regard
Une autre définition concerne l’appétence des utilisateurs au premier regard pour les produits must have : “les premiers utilisateurs reconnaissent facilement que le produit must have va leur faire économiser du temps et de l’argent. Vous n’éprouvez pas de difficultés à convaincre les utilisateurs que ce produit va rendre leur vie meilleure”. Comme les blagues, un produit indispensable n’aura pas besoin de beaucoup d’explications.
Faites un test : “vous les enlevez des mains de leurs premiers utilisateurs et regardez comment ils réagissent. S'ils ne se battent pas pour le garder, c'est que votre produit est pour eux un nice to have”. Le caractère indispensable est un critère tangible et observable.
Amour d’été
Une autre définition s’appuie sur des éléments plus conjoncturels. Un peu comme un amour d’été, certains produits passent mal l’hiver tandis que d’autres semblent éternels. “Vos utilisateurs seront-ils prêts à dépenser de l'argent même en période de récession pour continuer à l'utiliser ?” Pas certain. Quelles sont les activités, les loisirs, les abonnements que vous abandonnez lorsque vous rencontrez des difficultés financières ? À quels produits ou quels magasins renoncez-vous ? En revanche un produit ou service must have survivra à la mauvaise passe et pourra ensuite passer à l'échelle.
Contre-cycle
Certains produits sont même contre-cycliques : Airbnb par exemple s’est développé en 2008 en pleine crise financière aux USA. De nombreux propriétaires de logements se sont retrouvés dans l’obligation de les louer à des inconnus pour pouvoir rembourser leurs traites. Une plateforme permettant de trouver facilement des locataires et de sécuriser les transactions est devenue un must have là où sans doute elle n’aurait été qu’une activité marginale en période de prospérité.
Uber a également fait montre d’une belle résilience durant la pandémie : ses activités de transport presque totalement arrêtées par le confinement, ce sont les livraisons de repas et de courses qui ont pris le relais.
Ces exemples montrent que l’appétence pour un produit peut également changer selon le contexte : certaines situations contribuent à libérer les réticences au changement de comportement. Pour une entreprise, il faut savoir les saisir. Il est utile également d’imaginer une gamme de produits qui puissent répondre à différents besoins selon les contextes économiques, sociaux, voire politiques.
Apprendre à lire son marché
Pour avoir participé à des jurys de startups, les interrogations des investisseurs sur le statut futur d’un produit visent surtout à comprendre si les fondatrices ou fondateurs ont une vision claire et objective du marché.
“Se laissent-ils griser par quelques premiers retours positifs ou bien ont-ils une feuille de route claire pour passer des primo-adoptants au marché grand public” ?
Et c’est là que ce sujet sort d’une opposition binaire entre produits must et nice to pour entrer dans une vraie démarche de décryptage du marché :
Quel est le job to be done (encore un terme anglo-saxon !) de vos utilisateurs ?
Quelles sont les solutions actuelles de contournement qu’ils utilisent ?
Ce produit sera-t-il acheté par des particuliers ou des entreprises ?
Comment trouver les early adopters (décidément…) qui accueilleront votre produit avec enthousiasme malgré ses imperfections ?
Comment identifier le chemin critique qui vous permettra de conquérir le marché grand public, dont les contraintes et exigences sont plus élevées ?
Je n’entrerai pas aujourd’hui dans le détail des stratégies pour “franchir le gouffre” qui sépare les primo-adoptants du marché grand public : c’est l’objet d’un module entier de notre parcours d’apprentissage Business Design (voir plus bas). Mais cette séparation rappelle qu’un produit peut être un must have pour certaines entreprises avides d’innovations et qui ne craignent pas le changement, mais pas pour d’autres. Car dès que l’entreprise se structure, le -to have devient l’affaire de responsables fonctionnels, d’acheteurs et d’organisations dont votre propre attachement à tel ou tel produit est rarement le critère principal. D’où l’importance de pouvoir développer une stratégie spécifique pour ces deux segments de marché bien différents.
J’espère vous avoir donné envie de muscler votre capacité à lancer vos produits et services ! N’hésitez pas à partager vos expériences et interrogations en commentaire.
💛 L’Atelier de 15marches
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🧐 Et aussi
Des ressources utiles en lien avec le sujet traité cette semaine.
L’article de l’investisseur Yannick Oswald qui m’a inspiré cette édition - Are you a nice-to-have or must-have?
76% des lancements de nouveaux produits échouent lors de leur première année ! Et encore, il s’agit de produits de grande consommation - LSA - Étude Nielsen
Les 11 objets qui ont changé le monde. Combien en auriez-vous cité spontanément ? - Google Arts & Culture
Sur le job to be done - Pourquoi votre produit est une bonne solution au mauvais problème - 15marches
Sur l’aversion à la perte et le franchissement de gouffre - Comment lancer un produit innovant - 15marches
Sur notre rapport bien particulier à la propriété - C’est à moi ! - 15marches
🤩 On a aimé
Nos trouvailles de la semaine, en vrac et dans le désordre
On ne sait pas encore si le Metaverse sera un must have ou un nice to have, mais en tout cas il a déjà son moteur de recherche - LightHouse le moteur de recherche du Metaverse
Les solutions d’intelligence artificielle qui génèrent des images connaissent leurs premiers écueils, comme cette révolte des artistes japonais contre la récupération de leurs images : “les artistes ne sont pas un style, ils ne sont pas un produit”. 🍿 AI-generated art sparks furious backlash from Japan’s anime community
La recomposition des usages et comportements autour d’un mode de vie de “quarantenaires”, qui concernerait plusieurs générations de la vingtaine au grand âge, est fascinante Génération plan-plan : et si faire des activités de vieux était devenu un truc de jeunes ?
En voilà une réutilisation de haute volée des données publiques : Altimètre de la France
Là ce n’est pas une réutilisation mais un détournement - et si Google Agenda vous donnait le vrai coût d’une réunion ? J’adore le “send an email instead” :
Pour terminer sur un must have de la gastronomie, la savoureuse histoire de l’émoji Fondue 🫕 Pourquoi l’émoji « fondue » a-t-il été préféré à l’émoji « raclette » ? tiré de la non moins délicieuse newsletter Bulletin.
C’est terminé pour aujourd’hui ! Cette lettre prend des vacances bien méritées : on se retrouve le 28 février !
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Pour ma part je vous dis à la semaine prochaine !
Stéphane
Je suis Stéphane Schultz, de 15marches. Le jour je suis consultant, je prends des trains à travers les plaines. La nuit je lis et j’écris cette lettre.