🪢 Peut-on s'abonner à tout ?
L'abonnement est-il la bonne formule pour fidéliser des consommateurs de plus en plus exigeants et volatiles ? #196
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C’est reparti sur des chapeaux de roue pour l’agence en ce début septembre. Nous sommes ravis de collaborer comme l’année dernière avec Docaposte pour accompagner sa promotion de startups French ioT , avec MAIF sur plusieurs sujets aussi innovants que secrets, sans oublier Armasuisse, Beta Gouv, Orange et Paris 2024. Promis, on vous présentera aussi très vite notre nouvelle Product Manager avec qui nous préparons une solution d’apprentissage en ligne qui devrait sortir…cet automne si tout va bien 🤭
Nous espérons pouvoir grandir encore, mais cela dépendra aussi de vous chers lectrices et lecteurs - ceci n’est pas une publicité, juste un amical rappel que cette lettre gratuite et sans pub est rendue possible par celles et ceux qui font appel à nos services de conseil : qu’ils soient remerciés ici 🙏🏻.
On attaque le sujet de la semaine avec un classique de la stratégie plus que jamais d’actualité : faut-il privilégier un modèle d’abonnement ou de vente à l’unité ? Décryptage.
🎯 Cette semaine
Chaque semaine un nouveau sujet décrypté. Cette semaine, l’abonnement.
En 2016, alors qu’il recevait un Golden Globe (l’équivalent d’un Oscar du cinéma NDT) pour Howard in The Jungle, Jeff Bezos affirmait : “gagner un Golden Globe nous fait vendre plus de chaussures, et de manière très directe. Les abonnés à Amazon Prime Video achètent nettement plus que les non-abonnés, et l’une des raisons pour lesquelles ils le font est qu’une fois payé leur abonnement annuel, ils se demandent comment tirer plus de valeur de ce programme. Ils explorent de nouvelles catégories de produits et utilisent plus de services”. Lien vers l'interview
Jeff n’est plus aux commandes mais Amazon Prime continue de fasciner ses concurrents : tout à la fois programme de fidélisation et bouquet de services pour les utilisateurs - livraison rapide, vidéo, cloud, jeux,… - Prime est aussi un programme de fidélisation et un bouquet de services pour les fournisseurs - logistique, marketing et relation client (cf. notre analyse en lien).
C’est pourquoi les analystes lui préfère le modèle Netflix plus évident à comprendre quand on parle d’abonnement : un bouquet de contenus exclusifs accessibles de manière illimitée via un abonnement mensuel multi-supports. De même que l’on voyait beaucoup de “Uber de…” dans les années 2010, les “Netflix de…” (transport, santé, beauté, café,…) prolifèrent dans ces années 2020. Que l’on parle d’ailleurs de simples agrégateurs, de marques ou de distributeurs. Le point commun est de chercher à “capturer” le client dans un schéma à long terme qui le sorte de la simple transaction ou paiement à l’usage.
Comme le décrit très bien l’article de LSA en lien plus bas, l’abonnement quitte le secteur des services “contraints” comme l’énergie, internet, les transports,…pour gagner des pans de plus en plus larges de la consommation. Aux marques pionnières (DNVB) ont succédé des distributeurs comme CDiscount, Fnac Darty, ou…Décathlon. Jamais à court d’innovation, l’enseigne spécialisée vient de lancer un abonnement qui permet pour 20€ par mois de louer des articles de sport d’une valeur inférieure à 400€. Une vraie révolution dans le glissement de la vente de produits vers le service.
Pourquoi cet engouement soudain pour une formule vieille comme le commerce ?
La faute à la compétition acharnée que se livrent les producteurs et distributeurs de produits pour capter l’attention et fidéliser des consommateurs de plus en plus aguerris. Le coût d’acquisition client (terme marketing qui signifie l’ensemble des coûts destinés à transformer le prospect en client) augmente à mesure que disparaissent les possibilités de traquer l’internaute sur le web.
Alors, abonnement ou paiement à l’usage ?
Voici quelques conseils si vous hésitez entre ces deux modèles.
Tout ce qui brille n’est pas Netflix
Pour commencer, ne pas confondre un abonnement donnant un accès illimité (ex. : Netflix) avec un abonnement donnant un accès à un usage limité du service (ex. : votre forfait mobile) ou encore à des conditions/services particuliers (livraison, réductions); les attentes utilisateurs et les comportements induits ne sont pas du tout les mêmes; la fidélité non plus.
Conso à gogo
L'abonnement apporte à l’utilisateur la simplicité mais aussi une fidélité “forcée”, qui peut générer frustrations et des exigences plus élevées; il en voudra "pour son argent" (syndrome du forfait de ski) ce qui n'ira pas forcément dans le sens de la vertu et de la sobriété espérée par Décathlon notamment; dans le transport, la startup Whim a pu constater que les abonnés utilisaient régulièrement les services les plus “carbonés” du bouquet proposé : des taxis et VTC. Il n’y a pas de repas gratuit comme disent les Anglais.
Je t’aime, moi non plus
Pour le fournisseur, c'est la garantie d'une lisibilité de revenus et d’une trésorerie favorable, mais ceci implique un coût d'acquisition client (frais marketing et commerciaux) plus élevé; la tentation est grande aussi de ne prendre soin du client qu'au moment de l'acquisition ou du renouvellement et de délaisser les utilisateurs déjà "captifs" (pensez à votre forfait mobile). Le fournisseur devra aussi renouveler fréquemment son offre sous peine de décevoir un utilisateur qui en veut pour son argent (voir plus haut).
Ensemble, mais séparés
LSA rappelle le syndrome “Canal+” qui aurait traumatisé des générations d’abonnés par ses pratiques décourageant le désabonnement (Le Monde également d’ailleurs); le consommateur tient à sa liberté : il veut tous les avantages de la fidélité sans les inconvénients de la fidélité (engagement). L’équation est difficile entre des coûts élevés pour convaincre le client de s’abonner et une absence de visibilité sur sa fidélité - le fameux customer life time revenue - revenu sur la durée de vie du consommateur, autre concept marketing.
Promo ou abo ?
Plusieurs générations de consommateurs ont été biberonnées à la “promo” et aux “bons plans”. Il est souvent plus tentant pour elles de guetter ces avantages plutôt que de s’en retrouver privées par un engagement passé…Des arbitrages pas simples pour les marques, d’autant plus que la présence d’abonnés complique également la politique tarifaire pour les non-abonnés : comment éviter de cannibaliser l’une ou l’autre catégorie ? Les supporters du Stade Rennais Football Club me comprendront.
Comment trancher ?
Commençons d’abord par différencier les services "impulsifs", activés par le désir, qui s'accommodent très bien du paiement à l'usage, des services "prévisibles" avec peu d'affect pour lesquels l'abonnement convient mieux. Votre produit se rapproche-t-il de la première catégorie ou de la seconde ? Quelle type d’expérience souhaitez-vous proposer ?
Pour sortir de cette équation par le haut, nous recommandons surtout de créer une relation beaucoup plus étroite avec les clients : plutôt que de chercher à les retenir par des avantages, retenez-les par une vision claire et partagée, par une écoute et même un engagement beaucoup plus profonds. Le succès récent des coopératives, y compris dans le domaine de la grande consommation, montre que ces schémas répondent à des aspirations profondes des consommateurs : être plus que des clients ou des abonnés. Rejoindre des communautés d’intérêt qui regroupent producteurs, salariés, consommateurs et parties prenantes unis pour défendre la même “cause”...n’est plus l’apanage de militants ou des passionnés. Quand cette relation est librement consentie, elle peut s’avérer extrêmement fructueuse pour toutes les parties.
Visuel issu de l’une de nos formations sur les communautés.
Sans nécessairement transformer votre organisation en coopérative, vous pouvez vous en inspirer pour établir une relation plus solide et pérenne avec vos utilisateurs. Qu’ils soient ou non abonnés.
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🧐 Et aussi
Des ressources utiles en lien avec le sujet traité cette semaine.
Le modèle si particulier d’Amazon - Amazon l’Empire Invisible par 15marches
L’article de LSA (€) - L’abonnement la recette miracle pour la distribution ?
L’article du Soir (€)- Basculons-nous dans une société de l’abonnement ?
Quelques bases théoriques et pratiques : How To Move To a Subscription Business Model - Salesforce
Et si Uber était un service sur abonnement (2016) ? What if Uber was a subscription business?
Pour bien maîtriser les concepts et modèles économiques des agrégateurs : Spotify, Netflix, and Aggregation - Stratechery
🤩 On a aimé
Nos trouvailles de la semaine, en vrac et sans détour
Connaissez-vous l’Urbex ? Cette exploration des lieux inconnus de la ville, sans dégrader - ni révéler. What is Urbex ? - Gregabandoned
Google vient d’annoncer que leur solution Maps va proposer des itinéraires “à faible consommation de carburant” lorsque ceux-ci existent sans perte de temps. Google Maps can now tune its eco-friendly navigation for gas, diesel, and electrified vehicles
Waze de son côté arrête son service de covoiturage, officiellement en raison de l’évolution du télétravail. Google’s Waze is shutting down its carpooling service
Ne cherchez pas la cohérence mais sans doute plutôt une remise à plat des activités de Google sur fond de baisse du cours de bourse…
D’ailleurs, Google met également fin à Flights son service de réservation de vols, officiellement par manque d’utilisateurs. Google Will No Longer Be a Place to Book Travel as Fewer Travelers Were Using It
Pendant que nous sommes en l’air : cet article résume 70 ans de systèmes de distribution de billets d’avion, avec l’émergence des standards de réservation puis leurs évolutions. The technology that changed air travel
Nous évoquions aussi dans “Comment éclaircir le dark commerce” les fragilités du modèle de commerce sans magasin qui se développe à Paris et dans quelques grandes villes.
L’exemple de ce qui se passe en Inde où un seul restaurant “physique” peut créer jusqu’à 100 restaurants “virtuels” paraît hallucinant mais somme toute logique vu le modèle One kitchen, hundreds of internet restaurants
Ce sera sans doute plus difficile en France : outre les difficultés économiques liées à leurs stratégies de croissance sous stéroïdes, voici que la réglementation s’en mêle : jusqu’alors dans une zone grise juridique, ces commerces sont désormais assimilés à des espaces logistiques, ce qui les soumet à autorisation de la collectivité locale. Mauvais karma. La descente aux enfers du quick commerce s’amplifie
C’est fini pour cette semaine.
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👩🏻🚀 Tous les jeudis, Noémie raconte les futurs possibles en fiction.
Pour ma part je dis à la semaine prochaine !
Stéphane
Je suis Stéphane Schultz, de 15marches. Le jour je suis consultant, je prends des trains à travers les plaines. La nuit je lis et j’écris cette lettre.
J'émets de plus en plus de doute sur le service délivré par Prime. Plusieurs mauvaises expériences de livraisons ( sous traitées) du fait je pense de mon lieu d'habitation : zone rurale près de Bordeaux 😬.
À quoi bon s'abonner à un service qu'amazon peine à délivrer ??? plusieurs fois mes achats auraient été plus rapides finalement si j'étais allée directement au magasin ! Le service en zone rurale a encore des progrès à faire !!!
La formule d'abonnement est très intéressante en ce qui concerne les softwares et contenus dématérialisés, plus faciles à scaler. Car basés sur des coûts fixes élevés et du variable faible (comme pour Netflix).
S'agissant de produits, faut vraiment être costaud et faire des gros volumes (comme Amazon ou Décathlon) pour que ça soit rentable financièrement.
Et du point de vue du client, croulant sous une offre large et diverse, le grand avantage c'est surtout la simplicité et éviter la "decision fatigue".